Soyeuse, brillante et légère…
La soie est une matière textile naturelle dite d’origine animale : contrairement au lin ou au coton dont l’origine est végétale, la soie provient du cocon que fabrique la chenille du bombyx, soit « le ver à soie ».
Le fil de soie est un fil continu (contrairement au coton qui produit des fibres interrompues) d’une solidité excellente, comparable à un fil d’acier de même section. Rare, somptueuse, épatante par ses qualités techniques, la soie a toujours charmé les hommes et représente le luxe et la distinction. Nous vous proposons d’en savoir plus sur cette matière ancestrale à la beauté intemporelle voire inégalable.
Histoire de la soie
L’origine de la soie possède le charme d’un joli conte. On raconte en effet qu’une princesse chinoise aurait découvert la soie, 2700 ans avant JC, en faisant tomber dans sa tasse de thé un cocon de bombyx (le ver à soie, qui lui-même est la chenille d’un papillon) tombé d’un mûrier au-dessus d’elle. Un long fil se serait dévidé lorsqu’elle aurait tenté de récupérer le cocon…
La soie chinoise demeura un secret infiniment précieux et jalousement gardé pendant près de trois millénaires. Le ver à soie fut élevé dans le but de produire et de tisser la soie – un élevage que l’on appelle la sériciculture – et quiconque tentait de voler des vers à soie, des cocons ou même des œufs étaient condamnés à mort !
Forte de cette situation de monopole, la Chine commerçait avec le reste du monde. On a appelé « route de la soie » les chemins, traversant déserts et montagnes pour relier l’Asie à l’Europe, empruntés à partir du IIème siècle par les caravanes qui transportaient diverses richesses à des fins commerciales, dont la principale marchandise et la plus prisée était la soie.
Le monopole prit fin au VIème siècle lorsque deux moines envoyés par l’empereur Justinien cachèrent des œufs de vers à soie dans leurs bâtons de pèlerin et les ramenèrent jusqu’à l’Empire Romain d’Orient (ou empire byzantin), aux abords de la Méditerranée. Le mûrier et son ver à soie furent introduits dans l’ancienne Péloponnèse et en Grèce, mais c’est la Sicile qui maîtrisa réellement la première la sériciculture en 1440 et put alors produire la soie pour le reste de l’Europe (et en premier lieu pour l’Italie).
En France, la production de soie prit son essor sous Charles VIII qui fit planter des mûriers venus de Sicile et de Naples dans la région de Montélimar et encouragea les fabriques de soie de Lyon et de Tours par l’octroi de privilèges.
Puis Henri IV, sur les conseils d’Olivier de Serres, fit intensifier la plantation de mûriers, fournissant aux agriculteurs gratuitement, plants et graines de mûriers, ainsi que les œufs de bombyx. En 1850, la sériciculture française atteint un très bon niveau et Lyon devint un haut lieu de la soierie.
Aujourd’hui, les pays asiatiques représentent environ 90% de la production de soie mondiale, avec en tête la Chine et l’Inde. Le leader historique est redevenu le premier pays producteur : la boucle est bouclée !
En Chine, pratiqués dans les provinces du Zhejiang et du Jiangsu près de Shanghai et à Chengdu dans la province du Sichuan, ont une longue histoire.
La soie ne représente cependant que moins de 0,2 % du marché mondial des fibres textiles : elle reste un textile rare, plus long et compliqué à produire que bien d’autres textiles. On estime qu’un article en soie coûte environ 20 fois plus cher que son équivalent en coton.
De la matière première à l’étoffe
Le mûrier, arbre indispensable à la sériciculture
Le mûrier blanc, petit arbre trapu au feuillage vert plus ou moins sombre, pousse à l’origine en Asie mineure. Ses feuilles sont l’aliment de base du Bombyx Mori, le fameux ver à soi sur qui tout repose…
L’élevage des vers à soie
On élève les vers à soie dans des chambres chauffées appelées « magnaneries » selon un terme issu de l’occitan, la culture de la soie ayant commencé en France dans le Midi. Les magnaneries ressemblent à des casiers posés les uns au-dessus des autres, constitués de claies de roseaux.
Les œufs des vers à soie sont placés sur les claies, et la chaleur les fait éclore. On nourrit ensuite les vers à soie avec les feuilles du mûrier blanc, leurs croissances est d’un mois environ, puis ils entament la création de leurs cocons grâce à une bave sécrétée par des glandes situées le long de leurs corps. Le cocon sera achevé après deux jours. Lorsque les chenilles ont formé les cocons qui donneront la soie, il faut étouffer les cocons après ramassage par l’action d’une chaleur plus élevée. On procède alors au tirage du fil de soie. Par extension, le mot magnanerie désigne non seulement les chambres d’élevage des bombyx mais aussi les bâtiments complets dédiés à l’élevage des vers à soie.
Le tirage du fil de soie
On fait chauffer une bassine de cuivre plate et remplie d’eau, contenant les cocons, afin de dissoudre la gomme naturelle collée au fil de soie que l’on appelle le grès. On bat les cocons dans la bassine avec un petit balai de bouleau ou de bruyère (ou de paille de riz en Chine) et il devient possible de faire sortir les premiers fils des cocons appelés la bave et de dévider la soie. Chaque cocon ne donne qu’un seul fil continu.
Le fil de soie grège
Le fil de soie que l’on extrait directement du cocon est à la fois très fin et très long (jusqu’à 1000m !). On réunit une dizaine de ces fils originels pour former ce qu’on appelle le fil de soie grège, un fil plus épais et robuste, difficile à rompre. Les fils fins ayant été réunis pour donner le fil de soie grège se sont naturellement soudés entre eux lors du refroidissement grâce au grès. La soie grège est enroulée sur des dévidoirs. Puis, on en fait des écheveaux ou « flotte » : c’est le fil qui propre à être tissé. On peut aussi tordre le fil sur lui-même ou tordre plusieurs fils ensemble pour les assembler afin de constituer un fil plus fort : cela s’appelle le moulinage.
Le tissage de la soie
Les fils de soie sont montés sur un métier à tisser pour constituer « la chaîne » du tissage : une nappe de fils parallèles verticaux. La trame est apportée dans le tissage au moyen d’une « cannette », petite bobine insérée dans une « navette » en bois qui permet de distribuer le fil horizontalement dans le tissage, soit perpendiculairement à la chaîne. Les fils de chaine doivent être suffisamment solides pour supporter l’action du peigne du métier à tisser qui tasse les fils de trame au fur et à mesure de leur incorporation au tissage. C’est pourquoi ils doivent avoir subi préalablement l’étape du moulinage qui les renforce.
Les utilisations de la soie
En habillement
La soie est utilisée en habillement féminin et masculin, le contact de la peau avec la soie est agréable et sain car la soie ne provoque pas d’allergie et s’avère thermorégulatrice (chaude en hiver, plus fraîche en été). Bien sûr, le prestige de la soie la prédispose aux univers du mariage et de la haute couture. On peut enfin en faire des carrés et foulards (le fameux carré Hermès…), des paréos luxueux et des pochettes textiles à glisser dans les poches poitrine des vestes masculines.
Robe en soie et gants du soir Christian Dior, présentée au musée d’Art d’Indianapolis.
En tissu d’ameublement
Le tissu d’ameublement est enfin un débouché considérable pour le tissage de la soie. Il a fait la réputation de la ville de Lyon (on parle de soyeux lyonnais, de soieries lyonnaises…). On trouve le plus souvent les tissus d’ameublement de soie dans les châteaux et les demeures les plus prestigieuses. Les fabricants historiques reproduisent à l’identique des tissus d’ameublement anciens en soie pour la restauration du patrimoine, par exemple pour le château de Versailles, le Palais de l’Elysée…